Le burnout est-il un phénomène ou une maladie ?

Le burnout est-il un phénomène ou une maladie ?

Le burnout n’est pas une nouveauté. Honoré de Balzac en a fourni une description détaillée comme il savait si le bien le faire, en particulier dans son roman La Recherche de l’absolu. Cependant l’évolution des exigences du travail, en particulier en termes de charge mentale, a conduit d’une part, à ce qu’il soit mieux reconnu et d’autre part, à ce qu’il soit plus fréquent.

Un épuisement professionnel

L’OMS le décrit comme « un syndrome conceptualisé comme résultant d’un stress chronique au travail qui n’a pas été géré avec succès » et qui se caractérise par trois éléments :

  1. un sentiment d’épuisement,
  2. du cynisme ou des sentiments négatifs liés à son travail,
  3. une efficacité professionnelle réduite ».

Cette définition est proche de celle proposée en 2017 par la Haute Autorité de Santé (HAS). On peut considérer que le burnout est le stade ultime du stress.

La position de l’OMS

La nouvelle Classification Internationale des Maladies, la onzième de la série (CIM-11), a été adoptée au cours de la dernière Assemblée mondiale de la Santé et entrera en vigueur en 2022. La CIM joue un rôle fondamental en épidémiologie. C’est la langue commune qui permet d’établir des statistiques de santé dans tous les pays.

Le burnout était auparavant mentionné dans la CIM-10, déjà comme un « facteur influençant l’état de santé » et non comme une pathologie. Parmi ces facteurs, l’OMS distingue « les problèmes associés au travail ou au chômage » et la CIM-11 précise que le burnout « fait spécifiquement référence à des phénomènes relatifs au contexte professionnel et ne doit pas être utilisé pour décrire des expériences dans d’autres domaines de la vie ».

En clair, le burnout est un syndrome, c’est-à-dire une association de symptômes et non une maladie caractérisée. Et le phénomène est lié au travail.

Avancée ou régression ?

Faut-il se réjouir de la position de l’OMS ou bien la déplorer ? La reconnaissance en tant que pathologie semble certes plus forte que celle en tant que facteur influençant la santé. Mais mon avis personnel est que la position de l’OMS est plus juste au plan médical. Si le burnout est inquiétant, c’est parce qu’il conduit à des manifestations pathologiques graves, somatiques (comme des infarctus du myocarde) ou mentales (comme le suicide). C’est donc avant tout un facteur de risque même s’il ne faut pas nier la condition de souffrance associée à cet état.

Ceux qui veulent faire du burnout une pathologie ont en tête de lui obtenir un statut de maladie professionnelle ouvrant droit à une indemnisation spécifique. C’est une intention théoriquement intéressante en termes de réparation et de prévention, sauf que le dispositif actuel de la reconnaissance d’une maladie professionnelle est inadapté et lourd. Il est inadapté, parce qu’il est binaire : soit la maladie est 100 % d’origine professionnelle (et cela est difficile à prouver), soit c’est zéro. Il est lourd sur le plan des démarches à accomplir et cela décourage les demandeurs. Dès lors, cette revendication de reconnaissance ne peut guère déboucher sur des améliorations tangibles.

Le principal, me semble-t-il, est que la définition du burnout telle qu’elle est écrite dans la CIM-11 lui donne une existence devant permettre de développer des actions de prévention. Le fait que l’OMS propose de réserver le burnout aux seuls troubles induits par le contexte professionnel est une clarification utile et importante. Et le fait qu’elle en fasse la conséquence d’un échec de la prévention du stress chronique est assurément ce qui mérite d’être retenu de cette évolution.

Par le Professeur William Dab

Photo de W. DAB

Ouvrages de William Dab aux éditions Arnaud Franel :
ID Reflex’ Épidémies et pandémies
ID Reflex’ Santé et entreprises
La santé et le travail 2e édition

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William Dab
Titulaire de la chaire d’Hygiène et Sécurité Cnam – Malakoff Médéric, il travaille également au Laboratoire MESuRS (Modélisation, épidémiologie et surveillance des risques sanitaires EA 4628). Il est par ailleurs coordinateur du Réseau francophone de formation en santé au travail.

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