La bombe à retardement de l’avantage en nature
Des gentils parents engagent la transmission auprès de leurs gentils enfants de gentils biens immobiliers (jusque-là tout est gentil, mais c’est le début de l’histoirette).
Civilement et fiscalement, les parents ont intérêt à conserver l’usufruit… et ils le font !
Mais ils permettent à un enfant de jouir d’un bien dont il n’a officiellement pourtant que la nue-propriété. Oui, les parents auraient bien transmis la pleine propriété mais ils ne pouvaient que transmettre la nue-propriété notamment au regard de l’impôt sur les donations.
Et cela dure, dure, dure et dure encore… Plus cela dure et plus cela sera dur ensuite…
Les parents ont fait le premier pas, croyant bien faire. Ils décèdent dans une station de métro. Au décès des gentils parents, la fratrie devient méchante. L’avantage ainsi consenti sur une longue période est à requalifier comme un avantage en nature, une libéralité comme l’aurait été une donation de l’usufruit. Les conséquences civiles… et fiscales… sont alors violentes pour l’occupant !
Quelques précisions techniques :
– cela est dénommé une indemnité de rapport
– elle n’est pas à confondre avec l’indemnité d’occupation de l’article 815-9 du Code civil
– cela va correspondre aux loyers non encaissés, mais diminués des travaux qu’auraient dû supporter l’usufruitier
– l’écoulement du temps – contrairement à un bon vin – est sans effet côté prescription…
De là l’intérêt d’avoir anticipé et particulièrement sécurisé par un testament traitant ce genre de question. C’est là encore un des 10 gros avantages d’un testament finement rédigé (élire la loi applicable, éviter le droit de partage, faciliter les legs transgénérationnels, adapter la protection du conjoint, éviter les indivisions, régir le démembrement et l’indivision…)…
Conclusion : rien d’illégal à avantager ainsi indirectement un enfant, mais encore faut-il le sécuriser du vivant des parents pour que tout reste gentil et pas méchant.
Par Maître Antoine de Ravel d’Esclapon
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Le Patrimonio
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